Time Dusts

Conception & composition: Jean-Baptiste Barrière

Réalisation des images: Pierre-Jean Bouyer

Vidéo & régie: Isabelle Barrière

Percussions: Thierry Miroglio


Time Dusts reprend et développe des matériaux de percussions composés pour la musique du spectacle de Peter Greenaway 100 objets pour représenter le Monde. Détachés de ce contexte scénique et de certains éléments référentiels afférents, ils retrouvent ici leur nature abstraite et formelle, procédant des idées musicales, qui me sont chères, d'interpolations de timbres et de rythmes. Ils me permettent aussi de développer, dans cette version commandée par et créée au GRM en 2001 (la 1ère version, commande du Kunitachi College à Tokyo, fût créée au Festival Octobre en Normandie en 1998), les interactions entre processus sonores et visuels, qui procèdent ici des mêmes préoccupations formelles. Enfin, ils servent de base, pour moi, dans la quête d'une forme de narrativité abstraite en musique.


Un ensemble relativement restreint d'instruments (cloche plaque, cloche à vache et timbales graves, gong coréen, cymbale chinoise, log drum, bongos, temple blocks, caisse claire, crotales), a été choisi pour représenter les différentes familles de timbres sur une sorte de carte conceptuelle. Les catégories ainsi définies ont ensuite servi à élaborer des interpolations, des développements formels qui constituent des chemins à travers le matériau sonore ainsi représenté. Une démarche similaire a été mise en oeuvre pour le rythme, à partir d'archétypes, de personnages rythmiques.


La musique procède alors d'explorations de qualités de temps, de lumières et de couleurs, et aussi de jeux avec le langage, celui-ci apparaissant de manière progressive dans l'électronique.


Chaque geste du percussionniste est prolongé par l'ordinateur, déclenchant bribes de langage, traitements du son des instruments, synthèse de fragments musicaux ; et aussi séquences préparées et traitements de l'image du percussionniste en direct ainsi que de diverses sources naturelles pré-enregistrées.


Comme Cellitude, pièce pour violoncelle et traitements informatiques du son et de l'image, Time Dusts s'inscrit dans la série Reality Checks, qui met en scène des situations interactives sous la forme d'installations, et des pièces de concert sous la forme de performances, toutes deux basées sur la confrontation dans un cas du spectateur, dans l'autre du musicien, à son propre reflet et à ses devenirs électroniques.


Les sons des percussions sont captés par des microphones et transmis à un Macintosh sur lequel tourne le programme Max/MSP avec lequel tous les traitements sonores sont réalisés avant d'être spatialisés autour du public. Deux caméras captent des images du jeu du percussionniste et celles-ci sont transmises à deux autres Macintosh sur lesquels tournent le programme Isadora traitant les images qui sont projetées sur deux écrans (dont un circulaire doublant un gong) derrière le percussionniste. Les sons et les images captés et transformés en temps réel sont mélangés et interpolés (croisés) avec des sources pré-enregistrées provenant des percussions et d'autres origines principalement naturelles.


Ainsi l'électronique fonctionne comme un prolongement de l'écriture instrumentale, dont la fonction musicale semble être de révéler un devenir caché des instruments, pour continuer la formule de Gérard Grisey selon laquelle " la musique est le devenir des sons ".

Ici, voyelles et consonnes prolongent attaques et résonances percussives, pulsations quasi-obsessionnelles et polyrythmies sont les figures d'une dramaturgie musicale qui se joue à la frontière entre musique, langage et image.

<-